Construire un parti pour la révolution, pour intervenir dans la lutte des classes et y jouer un rôle


Le texte qui suit constitue la plateforme V du 4ème congrès du NPA (février 2018), 
soumis au vote des militantes et des militants par :  
Alex Fleury [membre du Bureau du Secrétariat Jeunes, comité jeunes Nanterre, 92N] ; Anatoli Fourcheyt [comité jeunes Grenoble, 38] ; Angélique Grosmaire [comité Evry, 91] ; Armelle Pertus [membre du Comité Executif, comité Asnières-Gennevilliers, 92N ] ; Baptiste Tys [comité Travail social, 92N] ; Ben Radek [comité Lille, 59], Bruno Cheminot [comité Tours, 37] ; Christophe Musslé [membre du Conseil Politique National, comité Lisieux, 14] ; David Larriven [membre du Conseil Politique National, Marseille-25 mars, 13] ; Françoise Ruch [comité Mulhouse, 68] ; Gaël Klement [membre du Conseil Politique National, comité Metz, 57] ; Gaël Quirante [membre du Comité Executif, comité Poste, 92N] ;  Hugo Perlutti [comité Le Mans, 72] ; Jacques Chastaing [membre du Conseil Politique National, comité Mulhouse, 68] ; Jean-Baptiste P. [membre du Conseil Politique National, comité Nanterre, 92N] ; Jean-Baptiste T. [membre de la Commission de Médiation, comité Asnières-Gennevilliers, 92N] ;  Laura Ortuno [comité jeunes Lyon, 69] ; Lucylle Atlante [comité jeunes Grenoble, 38] ; Marie-Hélène Duverger [membre du Comité Executif, comité Saint-Etienne-du-Rouvray/Quevilly, 76] ; Mathilde Stein [membre du Conseil Politique National, comité Nanterre, 92N] ; Mina Namkha [membre du Conseil Politique National, comité Levallois, 92N] ; Myriam T. [membre du Conseil Politique National, comité Rouen, 76] ; Régis Louail [membre du Conseil Politique National, comité Renault-Cléon, 76] ; Thierry Perennes [ comité Lannuon gwengamp bear, 22] ; Vanessa Ronchini [membre du Conseil Politique National, comité Nanterre, 92N] ; Victor Mendez [membre du Bureau du Secrétariat Jeunes, comité jeunes Nanterre, 92N] ; Vincent Fournier [comité Yvelines, 78] ; Xavier Guessou [membre du Conseil Politique National, comité Poste, 92N] ; Yaya Lemans [membre du Conseil Politique National, comité Le Mans, 72].

Notre plate-forme est portée par des camarades qui ont défendu à maintes reprises – depuis la création du NPA, à l’occasion des congrès ou des conférences nationales consacrées au positionnement du parti dans les échéances électorales – des orientations pour arrimer définitivement notre parti aux idées marxistes révolutionnaires. Nous continuons à assumer et nous nous revendiquons de ce qui été porté par la position B en 2009, la position 2 en 2011, la position Y en 2013, la position 3 en 2015 et la plateforme A (PF A) de la conférence nationale de 2016. Nous regrettons la division de la PF A, mais nous l’analysons comme la conséquence de son incapacité à avoir proposé une orientation commune pour la lutte de classe depuis le mouvement contre la loi El Khomri. Notre texte s’adresse à l’ensemble des militantes et des militants du NPA attachés à la construction d’un parti pour la révolution de demain et pour l’action révolutionnaire immédiate. 

Cent ans après la Révolution russe, et presque cinquante ans après la grève générale de 1968, notre courant politique – celui de l’extrême gauche anticapitaliste et révolutionnaire – ne peut que placer son combat dans la continuité des révolutions et des soubresauts révolutionnaires du passé. Mais nous ne sommes pas des nostalgiques de temps révolus. Nous ne « célébrons » pas le passé pour ne pas agir au présent au prétexte que les réalités du monde seraient bien différentes et qu’il serait bien plus difficile d’y faire surgir le souffle révolutionnaire. Bien au contraire, si nous sommes des révolutionnaires, c’est d’abord parce que nous avons profondément confiance en l’idée que tout peut changer, de fond en comble, comme cela a pu se produire en 1917 dans la vieille Russie des tsars et des popes. Le vieux monde peut s’écrouler comme un château de cartes et faire place à une autre société. Et nous militons avec cette conviction fondamentale selon laquelle la révolution reste plus que jamais d’actualité, au sens où elle sera la seule façon pour l’humanité d’en finir avec ce monde capitaliste pourrissant. Nous voulons donc nous y préparer, sans jamais envisager une autre voie. 

Nous y préparer, cela signifie « être prêts » ; prêts à l’imprévisible, à l’extraordinaire, et en même temps, être prêts à ce qui relève de la nécessité : en finir avec le capitalisme avant qu’il en finisse avec l’humanité. C’est pour cela que nous défendons l’urgence de construire un parti pour la révolution, ici et maintenant, à partir de ce que nous sommes, nous les membres du NPA, mais aussi bien sûr avec l’ensemble des militantes et des militants des organisations d’extrême gauche, et avec celles et ceux qui, dans le monde du travail et la jeunesse, refusent de courber l’échine face aux injonctions à respecter l’ordre établi. C’est pour cela que nous défendons la possibilité de faire des pas concrets vers la construction de ce parti, immédiatement, à condition d’être à la hauteur des enjeux ; à condition de saisir, dans la lutte des classes, les occasions qui permettront à notre courant politique de gagner en influence auprès de milliers de travailleurs et de jeunes, et de faire la démonstration qu’un parti révolutionnaire reste indispensable à la construction au jour le jour du rapport de force face à la bourgeoisie et pour notre émancipation. Ces 25 dernières années, partout où les travailleurs et la jeunesse se sont mis en mouvement, il a manqué de révolutionnaires, en particulier de militantes et de militants convaincus que leur action et leur détermination à agir pour inverser le rapport de force sont des éléments centraux, et qu’elles sont la meilleure préparation à l’irruption spontanée des masses. Il est temps que cela change, il est temps que nous dépassions notre état d’impuissance, de commentateurs ou d’observateurs de la situation. Il n’y a aucune fatalité à ce que les idées communistes révolutionnaires soient reléguées à l’arrière-plan. Encore faut-il avoir l’objectif, la volonté de leur faire retrouver la pleine lumière. 


1 – Un bilan nécessaire pour avancer 

Le temps d’un congrès est d’abord celui des bilans. La situation difficile dans laquelle se retrouve notre organisation en termes d’audience et de recrutement – comme, d’une manière plus générale, toutes les organisations révolutionnaires –, n’est pas le fruit du pur hasard. Les critiques au sujet des tendances et des fractions au sein du NPA sont en fait un bon prétexte pour occulter les responsabilités de la direction historique de la LCR, de la IVème Internationale version Secrétariat unifié (SU). 

1.1. L’échec du NPA, c’est l’échec de la direction de la LCR 

Depuis la création du NPA en 2009, le flou a été entretenu sur ses délimitations stratégiques ; lors du congrès de fondation, cela s’est illustré par le refus – d’une courte majorité – de faire apparaître le terme « révolutionnaire » dans le nom de notre organisation. Ce flou a débouché sur une crise d’orientation quasi-permanente, dont le paroxysme reste à ce jour le départ d’une partie de la direction historique de la LCR vers une organisation réformiste, suivi par un délitement progressif du NPA. 

Mais le reste de la direction historique restée au NPA – dont la position 1 (P1) du congrès de 2015 est l’héritière – n’a pas pour autant cessé de pencher vers une hypothèse stratégique particulièrement problématique : celle qui vise à combiner des victoires sociales d’ampleur avec l’accès au pouvoir de partis se réclamant de la gauche anti-libérale ou anti-austérité, au détriment de la grève générale insurrectionnelle. En janvier 2015, lors du précédent congrès, les camarades de la P1 ont noirci des pages et des pages pour dépeindre la victoire de Syriza en Grèce comme une victoire pour les classes opprimées et exploitées. Dans la déclaration du Bureau du SU de la IVème internationale de janvier 2015, on pouvait ainsi lire : « L’enjeu est clair, décisif : il faut battre la droite et l’extrême droite grecque et tout faire pour que la gauche grecque, dont Syriza est la principale composante, gagne ces élections, afin de créer une dynamique sociale et politique pour un gouvernement de gauche, qui doit s’efforcer de réunir toutes les forces prêtes à rompre avec la politique d’austérité et lutter contre les pièges du nationalisme chauvin » (Inprecor n°612-613, février-mars 2015). 

Trois ans plus tard, il est frappant de constater qu’aucun bilan de cette orientation n’est tiré par les camarades de la P1, à l’aune des faits survenus en Grèce depuis l’arrivée de Syriza au pouvoir. Sauf s’il s’agit d’un refus délibéré de reconnaître ses erreurs... quitte à les reproduire ! La présence, au sein d’une même Internationale, à la fois de membres de la Gauche anticapitaliste (GA) et du NPA peut passer pour une « anomalie » ; mais pour la P1, c’est aujourd’hui clairement un creuset pour une nouvelle recomposition. Le congrès du NPA, très proche du congrès mondial de la IVème Internationale, revêt de fait un enjeu majeur pour la majorité de la direction du SU : disposer enfin d’une majorité absolue dans le NPA, pour défendre et mettre en œuvre l’objectif flou de la construction d’une force pour les opprimés et les exploités. Une telle démarche peut réamorcer un cycle de rapprochement avec les réformistes (Ensemble, etc.) et conduira inévitablement à une nouvelle crise de l’organisation. 

1.2. L’échec d’une orientation basée sur l’abandon, dans les faits, 
de l’hypothèse stratégique de la grève générale 

Les camarades qui prétendent aujourd’hui diriger majoritairement le NPA ne se préparent pas à des bouleversements révolutionnaires. Ils estiment que la période est trop marquée par un rapport de force favorable à la bourgeoisie ; c’est l’élément central sur lequel ils s’appuient pour défendre l’idée qu’une inversion de la situation ne pourra se faire sans « alternative politique », comme l’illustre bien la résolution politique du CPN des 29 et 30 avril 2017, présentée par Manu, Antoine et Léon : « L’absence d’un parti représentant les intérêts des exploitéEs et des oppriméEs laisse les mains libres aux ennemis des classes populaires. [...] Mais nous voulons aussi, au-delà de ces luttes, tracer la voie du rassemblement dans une même force politique autour d’un programme anticapitaliste, de rupture révolutionnaire avec le capitalisme et avec ses institutions, qu’elles soient nationales ou européennes. Nous voulons débattre de ce projet avec toutes celles et tous ceux qui cherchent la voie de ce rassemblement nécessaire, certes des organisations ou groupes militants constitués, mais surtout en nous adressant, en rencontrant dans des réunions ouvertes... des militantEs du mouvement social. La refondation d’un projet politico-social et idéologique alternatif à ce capitalisme destructeur de droits sociaux et de l’environnement ne sera crédible et attractive que si elle émerge de pratiques pluralistes et démocratiques, ancrées dans les réseaux militants, rejetant la subordination des mouvements sociaux aux partis politiques – donc en inventant une redéfinition radicale du "politique". »

Cette conviction les pousse, d’une part, à envisager prioritairement une politique basée sur l’interpellation des réformistes, et d’autre part, à sous-estimer les possibilités d’irruption de notre classe sociale sur la scène politique et sociale, et à relativiser sa capacité à en finir avec le système capitaliste. 

En 2016, durant la mobilisation contre la loi El Khomri, le NPA n’a joué aucun rôle significatif en tant qu’organisation. Ce n’était pas seulement dû à la faiblesse de son implantation ; son engouement suiviste pour les « Nuits debout » dissimulait en fait l’absence d’une orientation pour le mouvement, alternative à celle des directions syndicales. Dans les faits, la grève générale comme hypothèse stratégique a été abandonnée par une partie des camarades de la direction du NPA, qui ne voient donc plus forcément l’intérêt de défendre activement le dépassement de la politique des directions syndicales par l’agitation autour du mot d’ordre du « tous ensemble », ni sa mise en pratique dans les secteurs où nous avons une certaine implantation. C’est pourquoi le potentiel de détermination, de radicalité et de renouvellement incarné par ce que nous avons appelé une « avant-garde large » – cette frange de travailleurs et de travailleuses, de jeunes, issue de traditions militantes différentes, des syndicalistes CGT aux libertaires et autonomes de « Génération ingouvernable » – n’a pas été polarisé par le NPA, si ce n’est de façon marginale par des initiatives d’AG et de cortèges interprofessionnels dans les manifestations parisiennes, et par une politique volontariste d’AG de grévistes dans quelques secteurs (SNCF et Poste en région parisienne, là encore). 

1.3. L’échec d’une orientation, qui débouche sur une paralysie 
organisationnelle et une faiblesse programmatique 

Trop souvent, le NPA a été réduit à commenter les événements de la lutte des classes. La cause en est d’abord, fondamentalement, sa faiblesse d’implantation, mais aussi son incapacité à prendre désormais la moindre initiative, comme s’il était tétanisé à l’idée de disputer à la gauche réformiste ou aux directions syndicales le monopole de la représentation des intérêts politiques de notre classe. Résoudre cette faiblesse d’implantation doit à la fois passer par une priorité organisationnelle donnée à la construction dans le monde du travail et dans la jeunesse, et par des prises d’initiatives non seulement au cœur des mouvements, mais aussi, de manière plus volontariste, lorsque ceux-ci passent par des phases de basse intensité. Ces initiatives doivent permettre que des travailleurs et des jeunes nous reconnaissent comme étant tout à fait indépendants des organisations de la gauche institutionnelle et des bureaucraties syndicales. Ainsi, quelle justification peuvent avancer aujourd’hui les camarades qui refusent de participer à la construction du Front social, alors que durant des décennies, les tentatives de formation d’oppositions syndicales – dans la CGT comme dans la FSU – ont toutes échoué ? Quel est le sens de leur refus, alors que le Front social permet des regroupements d’équipes militantes combatives et critiques au-delà des seuls rangs de l’extrême gauche, et que bien plus que représenter les exploités et les opprimés, il permet de favoriser leur convergence dans l’action ? 

Depuis deux ans, la campagne de Philippe Poutou a été la seule apparition visible du NPA au niveau national. Il est positif que notre organisation ait pu présenter un candidat ouvrier, dont la popularité s’est renforcée : il a été clairement identifié à la fois comme un farouche opposant à Fillon, Le Pen et Macron, et comme un candidat dénonçant les ravages de la société capitaliste. Cela ne doit pas nous empêcher de dire que notre campagne a souffert de deux faiblesses majeures :
  • une trop grande intériorisation de la dégradation des rapports de force, rendant notre candidat incapable de faire résonner dans ses déclarations la colère sociale qui venait de s’exprimer dans le mouvement contre la loi Travail ;
  • mais aussi une faiblesse programmatique : sur les réponses immédiates à apporter à celles et ceux qui veulent se battre et se regrouper – et qui, connaissant largement les difficultés de la situation, ont besoin de propositions pour contrecarrer le fatalisme ambiant –, de même que sur la perspective communiste… et sur le lien entre ces deux aspects. 

Notre score modeste n’est pas un problème en soi. Ce qui l’est en revanche, c’est le fait qu’il ait été utilisé par une partie de la direction pour répandre l’idée qu’une présence de Mélenchon au second tour aurait changé bien des choses, puis pour remettre en cause la nécessité de se présenter aux élections législatives. 

De manière plus générale, alors que Mélenchon et sa France Insoumise (FI) ont donné une structuration et un visage nouveaux à la vieille gauche institutionnelle et nationaliste, notre organisation est incapable d’avoir un positionnement qui l’en démarque clairement. C’est en profitant de l’effondrement du PS et du PCF que Mélenchon et la FI ont obtenu leurs bons résultats aux présidentielles et législatives de 2017, et c’est à ce titre qu’ils veulent s’octroyer le leadership en matière de reconstruction d’une gauche de gouvernement. Le NPA n’a rien à voir avec cette démarche, au contraire, il doit la combattre : Mélenchon postule à la direction d’un gouvernement dans le cadre du système capitaliste, dont les révolutionnaires que nous sommes préparent le renversement. Le NPA ne peut pas considérer Mélenchon comme un « partenaire » à qui il reprocherait de la jouer « solo » ; c’est pourtant ce qu’a fait la majorité de la direction du NPA lors de la manifestation nationale du 23 septembre 2017 appelée par la FI. En revanche, nous devons saisir chaque occasion pour nous adresser aux milliers de jeunes et de salariés captés par Mélenchon, qui ont voté pour lui, participent à ses initiatives, voire rejoignent les rangs de la FI comme d’autres rejoignaient le PCF autrefois. Les cadres de front unique, les organisations de masse, sont les lieux les plus appropriés pour nous confronter à ce milieu très large, souvent influencé aussi par les bureaucraties syndicales ; d’abord en défendant à drapeau déployé nos idées – internationalistes, révolutionnaires, pour l’auto-organisation –, mais aussi en proposant des perspectives d’actions pouvant modifier le rapport de force en faveur de la classe ouvrière. Car c’est dans les luttes communes et dans le feu des mobilisations que nous pourrons convaincre de nos orientations fondamentales. Il faut pour cela, à la fois, une organisation active et capable d’initiatives – parce que décidée à disputer aux directions bureaucratiques l’influence sur de larges milieux –, et une organisation affichant clairement des perspectives révolutionnaires. 


2 – Et pourtant, la situation nous offre des possibilités 

La situation sociale est indéniablement marquée par une offensive de plus en plus violente d’une bourgeoisie obsédée par la restauration de son taux de profit. Crise écologique sans précédent, tensions inter-impérialistes, interventions militaires redoublées, discours dominants imprégnés de racisme et de xénophobie : la barbarie n’est pas seulement un risque pour l’avenir, c’est d’ores et déjà une réalité pour la majeure partie de l’humanité. 

Pour autant, si le rapport de force entre les classes s’est fortement dégradé aux dépens du prolétariat, nous combattons l’idée qu’il faudrait renoncer à l’actualité de la révolution, et attendre patiemment des « jours meilleurs » en abandonnant la construction de partis militants pour l’intervention au cœur de la lutte des classes avec une boussole adaptée à notre projet de renversement du capitalisme. Au seuil du XXIème siècle, la situation du capitalisme se caractérise par tant de contradictions qu’elle recèle, pour les communistes révolutionnaires, de réelles opportunités de faire entendre leurs idées et de les renforcer. Des résistances de masse existent partout dans le monde, avec des luttes ouvrières nombreuses, répétées et radicales malgré leur dispersion. La crise prolongée de l’économie capitaliste engendre une instabilité politique chronique et bouleverse les vieux équilibres hérités du XXème siècle. Dans des franges significatives de la classe ouvrière et de la jeunesse, il existe une perception du fait que ce système est pourri et qu’il nous mène à la faillite. Notre responsabilité est de répondre à ce dégoût profond du capitalisme, en offrant une méthode et un programme d’émancipation pour en finir radicalement et définitivement avec ce système. Sans cela, les forces politiques les plus réactionnaires, notamment d’extrême droite, pourront continuer à capter la colère d’une fraction de plus en plus significative de notre classe sociale, et la détourner vers des impasses mortelles pour elle-même et l’ensemble de l’humanité. 

2.1. Une radicalisation de la jeunesse mobilisée 

Depuis le début des années 2000, plusieurs vagues de mobilisations ont eu lieu dans la jeunesse. Certes, elles ont été de natures diverses, à la fois sociologiquement et politiquement : manifs contre Le Pen en avril-mai 2002, émeutes de la jeunesse des banlieues en 2005, mouvement anti-CPE en 2006, mobilisation contre la loi El Khomri en 2016 ; mais chacune à leur manière, elles ont exprimé un refus de la société capitaliste et de sa brutalité à l’égard des minorités, des pauvres et des exploités. Il y a un décalage de plus en plus important entre ces poussées de fièvre régulières, capables de mettre la jeunesse dans la rue – et d’y entraîner les milieux salariés combatifs et organisés, comme en 2006 et 2016 –, et la capacité des organisations traditionnelles du mouvement ouvrier à répondre à cette volonté, chez des jeunes, de ne pas accepter l’inacceptable et de contester la société capitaliste. Mais l’extrême gauche organisée n’est pas devenue non plus le vecteur de cette contestation et de cette politisation. En 2016, dans la jeunesse, l’influence des mouvances libertaires et « autonomes » a été notable, allant jusqu’à contester la direction du mouvement aux courants traditionnels, réformistes et d’extrême gauche. Cela s’explique par la faiblesse numérique du mouvement en lui-même, mais aussi, du côté des organisations d’extrême gauche, par une incapacité à comprendre la dynamique de ce mouvement, à comprendre comment s’organiser face à la violence policière dans les manifestations, comment refuser les manifestations en cage, et comment tisser des liens « interpro » entre les différents secteurs en lutte du mouvement ouvrier et de la jeunesse. 

De manière activiste, les courants autonomes, libertaires et gauchistes ont su capter une frange minoritaire de la jeunesse qui, elle, voulait aller jusqu’au bout, déborder les directions réformistes ou refuser les atteintes de l’État à ses libertés. Ils connaissent actuellement une crise de croissance qui, s’ajoutant à leur hétérogénéité, les empêche d’occuper une place hégémonique dans la jeunesse. Ils ont cependant gagné dans une partie de celle-ci un crédit que nous devons leur disputer par une politique révolutionnaire audacieuse en direction des jeunes et liée aux luttes ouvrières ; audacieuse face à l’appareil d’État, sa police, sa justice et ses bureaucrates réformistes. 

2.2. Une crise inédite dans les syndicats 

La politique de Macron est limpide, c’est une véritable guerre sociale : loi travail XXL, remise en cause de la sécurité sociale et des retraites, sélection renforcée à l’université, inscription de l’état d’urgence dans le droit commun. Pourtant, toutes les grandes confédérations et unions syndicales refusent de porter une orientation d’opposition réelle aux politiques gouvernementales et patronales, malgré la gravité des attaques contre le monde du travail et les classes populaires. Entre les directions syndicales qui ont choisi ouvertement la collaboration avec les gouvernements successifs – comme la CFDT –, celles qui désorganisent, diluent, dispersent voire étouffent toute possibilité de convergence des luttes et d’expression coordonnée et radicale de la colère sociale accumulée – CGT, FSU, FO –, et celles qui ne sont plus bonnes qu’à accompagner les précédentes sans même oser proposer une orientation alternative – Solidaires –, le MEDEF peut dormir sur ces deux oreilles. 

Dans les salons de l’Élysée ou de Matignon, les poignées de main échangées entre dirigeants gouvernementaux et chefs syndicaux suscitent de plus en plus de réactions de colère chez les syndicalistes sincères et un tant soit peu « lutte de classe ». Si nombre d’entre eux sont déboussolés et écœurés, s’ils ne savent plus très bien à quoi sert leur organisation, une minorité commence à ruer dans les brancards et à critiquer ouvertement les tactiques des directions. 

Dans la CGT, il existe depuis plusieurs années une crise larvée, depuis l’affaire Lepaon en réalité. Elle se manifeste de diverses manières : chamboule-tout directionnels dans plusieurs congrès fédéraux, prises de position régulières de certaines unions départementales contre la politique de « dialogue social » ou contre le « syndicalisme rassemblé ». L’émergence du Front social est l’une des conséquences de la rupture d’une frange – certes minoritaire mais emblématique – de syndicats et de leaders combatifs (Goodyear, Info’Com) avec la stratégie confédérale, incapable de mener au « tous ensemble ». 

Au sein de Solidaires, tout n’est plus aussi consensuel qu’avant. Les incidents liés au « fonctionnement » et aux statuts, lors du dernier congrès national de juin 2017, sont révélateurs d’une adaptation de plus en plus marquée de son petit appareil directionnel aux travers bureaucratiques. Les crispations du Secrétariat national au sujet des prises de positions de certains de ses syndicats ou de ses structures départementales contre sa politique suiviste à l’égard de la CGT et du reste de l’« intersyndicale », ou contre son refus de rejoindre et de construire le Front social, indiquent que l’orientation défendue par la direction actuelle de Solidaires commence à susciter des oppositions. 

Quant à la FSU – qui historiquement s’était créée en réaction au syndicalisme d’accompagnement de l’Unsa –, ces dernières années elle s’est positionnée à plusieurs reprises à droite de l’échiquier syndical, et elle a collaboré systématiquement avec le gouvernement. Son opposition « de gauche », l’École émancipée, a renoncé à tout combat sérieux contre la direction majoritaire. C’est ce qui explique en grande partie le désinvestissement militant et électoral du milieu enseignant à l’égard de cette fédération. Face à l’absence, de la part des directions syndicales, d’une volonté de mobiliser contre la disparition de l’éducation prioritaire en lycée, des équipes combatives ont décidé de se regrouper à la rentrée 2016, toutes étiquettes syndicales confondues (CGT, FSU, Sud, etc.), et de défendre une même politique volontaire de coordination et d’extension dans le cadre du mouvement de grève « Touche pas ma ZEP ! », qui a permis à cette lutte de prendre un caractère national. Dans le secteur de l’éducation, traditionnellement très encadré par la FSU, le fait qu’un mouvement de grève auto-organisé ait pu se construire et aboutir à des victoires partielles très concrètes (salaire, mutations, etc.), même si c’est sur une question très spécifique, montre que dans cette situation de crise, les révolutionnaires peuvent être amenés à avoir des responsabilités nouvelles. 

2.3. Le Front social, expression de ces phénomènes 

À l’origine du Front social, il y a le regroupement d’équipes militantes qui avaient fait de nombreuses expériences de luttes depuis plusieurs années, chacune de leur côté, séparées dans le temps et dans l’espace, avec des étiquettes syndicales et des pratiques différentes ; à ces équipes, la séquence de la lutte contre la loi Travail a fait franchir un cap dans la réflexion pour créer les conditions de la victoire contre le patronat. Mais aussi un cap dans la volonté de mettre réellement en pratique une politique alternative aux directions syndicales, à une échelle certes d’abord modeste, mais en tout cas bien plus efficace que toutes les tentatives d’« opposition syndicale » parlementaire péniblement construites durant les dernières décennies au sein de la CGT. Alors que les directions syndicales ne proposent rien – ou plus rien –, le Front social défend l’action, et son orientation politique repose sur deux piliers : 
  • d’une part, il n’y a pas d’atonie de notre camp social, mais ses combats sont atomisés, dispersés, isolés, et il nous faut donc être tous ensemble au même endroit, à la même heure et pour la même cause, nous « unir pour ne plus subir » ; 
  • d’autre part, seule une paralysie des moyens de production, des transports et du secteur de l’énergie ébranlera les exploiteurs, autrement dit, seule la grève générale et reconductible nous permettra de gagner, d’inverser le rapport de force. 
Le Front social regroupe des militantes et des militants syndicalistes, associatifs, politiques, de fronts et de collectifs de lutte étant parvenus à dépasser l’esprit sectaire ou boutiquier, que l’expérience a convaincus d’œuvrer pour la grève générale, et qui sont prêts à en découdre avec l’État et son appareil répressif. Alors que la tendance lourde est à la collaboration de classes de la part des directions syndicales, le Front social est un outil précieux qui a déjà exercé, à une échelle large, une pression ou une influence sur les appareils, les milieux militants ouvriers et syndicalistes et sur une partie de la jeunesse s’étant mobilisée pendant le mouvement contre la loi El Khomri. L’une des nouveautés du Front social réside dans le fait que par son intermédiaire, des militants ouvriers ont commencé à établir des liens concrets entre le mouvement ouvrier et les opprimés, réprimés de tous les mouvements sociaux, jeunes des quartiers populaires, colonisés de Guyane, de Guadeloupe, des Comores, etc., et qu’ils esquissent ainsi une orientation en paroles, mais surtout en actes, contre le colonialisme, le nationalisme et le militarisme, comme lors de la manifestation du 14 juillet par exemple. Les manifestations des 22 avril, 8 mai, 19 juin, 14 juillet et 18 novembre 2017 sont des succès militants dont l’impact s’est fait sentir au-delà de ses milliers de participants. Le Front social est devenu un fait politique, qui dépasse très largement ceux qui l’ont lancé, un outil d’unité d’action que les révolutionnaires doivent construire et amplifier. Il mène un effort permanent – en particulier par le biais de sa page Facebook « Luttes invisibles » et à travers des activités de soutien aux mobilisations locales – pour mesurer la conflictualité et la conscience des travailleuses et des travailleurs qui luttent, ce qui est indispensable pour tenter de jouer un rôle dans la lutte de classes. Le Front social est la démonstration qu’il existe bien une avant-garde des luttes, que celle-ci s’est rencontrée, a milité et fait ses armes pendant le mouvement contre la loi Travail. C’est la confirmation qu’il est possible de former un pôle ouvrier « lutte de classe ». 

2.4. Construire un pôle ouvrier « lutte de classe » : une priorité 

Construire un « pôle ouvrier » autour de salariés et d’équipes militantes combatives, pour être en mesure de mener de manière coordonnée une politique indépendante des directions réformistes dans un nombre suffisant de secteurs : cette idée n’est pas née avec le Front social (LU-Danone en 2001, New Fabris en 2009, Licenci’elles en 2012-2013, Bretagne en 2013). Pour les révolutionnaires que nous sommes, les décantations politiques qui ont lieu aujourd’hui au sein d’équipes syndicales combatives venues bien sûr d’autres histoires politiques que la nôtre – mais aussi dans une frange de la jeunesse attirée par les idées anticapitalistes et désireuse de s’affronter à l’État – sont une chance, une vraie opportunité à saisir. 

Depuis des décennies, l’extrême gauche cherche à disputer des franges significatives de travailleurs à l’influence des réformistes et des directions syndicales. Il est donc paradoxal qu’au moment où cela se produit à une petite échelle – surtout pour des raisons objectives, mais aussi grâce au travail militant de petites équipes de révolutionnaires –, au mieux elle ignore, au pire elle combat, l’apparition du Front social. La campagne présidentielle du NPA n’a jamais fait le lien avec l’appel au « 1er tour social » – cette manifestation du 22 avril, la vieille du premier tour de la présidentielle, à l’initiative de ce qui allait devenir le Front social –, et cela a été une erreur politique. 

Le Front social est pourtant un point d’appui pour le regroupement des nombreuses grèves isolées et éparpillées qui existent aujourd’hui, et que les directions traditionnelles cherchent à atomiser. C’est un moyen pour faire converger une partie de l’avant-garde militante qui, lors du mouvement contre la loi Travail, avait œuvré pour une généralisation du conflit. C’est une véritable politique à mener pour des révolutionnaires, un outil pour le front unique : il s’agit de travailler à un regroupement de forces issues de diverses tendances du mouvement ouvrier, pour s’opposer aux attaques des capitalistes, et dans lequel nous devons intervenir afin de pousser l’affrontement toujours plus loin. Au-delà de telle ou telle échéance de lutte et de manifestations, l’objectif est de constituer l’embryon d’un pôle « lutte de classe » dans le mouvement ouvrier, qui soit une alternative aux directions réformistes. Notre présence dans ce « pôle ouvrier » en cours de constitution nous permet d’éprouver nos idées révolutionnaires auprès de secteurs militants combatifs qui contestent les directions réformistes. Nous ne construisons pas le Front social avec l’idée que nous y sommes pour lui injecter, de l’extérieur, une conscience révolutionnaire. Si nous entendons y défendre notre point de vue et y être utiles, nous apprenons de l’expérience menée avec les camarades qui composent le Front social : en particulier, nous apprenons à formuler une politique, à proposer une stratégie de mobilisation et des initiatives, à une échelle bien plus large qu’habituellement, y compris par le biais syndical. 

Nous concevons le Front social, ce pôle ouvrier en construction, comme un outil indispensable pour organiser la riposte à la politique de Macron et du MEDEF, comme une arme qui pourra s’avérer précieuse quand le climat social sera explosif. Mais aussi comme un creuset d’où peuvent émerger des militants « lutte de classe » et des révolutionnaires. Ne rien tenter vis-à-vis de ces militants, ce serait renoncer à organiser ces progrès en termes de conscience, et les laisser se dilapider. Car nous ne réduisons pas le rôle des révolutionnaires à celui de propagandistes qui, dans l’attente de jours meilleurs, seraient de simples passeurs des idées communistes. Nous devons chercher à prendre des initiatives pour accompagner et regrouper les décantations qui s’opèrent dans la conscience d’une partie des jeunes et des salariés. Pour mettre en mouvement les travailleurs plus largement qu’ils n’en auraient été capables avec leurs simples forces, les révolutionnaires ont toujours participé à des cadres larges dans lesquels se sont côtoyées différentes traditions du mouvement ouvrier. 


3 – Construire un parti révolutionnaire 

3.1. Implanté dans les entreprises 

Nos deux objectifs stratégiques permanents sont la révolution socialiste, aboutissant au pouvoir des travailleurs auto-organisés, et la construction du parti révolutionnaire, indispensable à la victoire de cette révolution. Le NPA doit être un outil pour forger un parti capable de diriger une révolution de même nature que celle d’Octobre 1917 en Russie. 

Dans la situation et les rapports de force actuels, le NPA n’a aucun moyen de devenir immédiatement un « parti de masse », à même de peser dans tous les secteurs exploités et opprimés, dans tous les domaines de la vie sociale. En revanche, nous pouvons aujourd’hui avancer dans la construction d’une véritable organisation révolutionnaire, influente et implantée à l’échelle nationale, liée étroitement aux processus les plus avancés de résistance, de lutte et de radicalisation du monde du travail. Pour pouvoir défendre une orientation alternative aux directions syndicales et aux appareils réformistes, il faut des militantes et des militants capables de jouer un rôle quand les travailleurs se mettent en mouvement. La volonté de s’implanter prioritairement dans les entreprises est liée à notre projet politique. Par la place qu’elle occupe dans la production et l’économie, nous savons que seule la classe ouvrière – d’ailleurs bien plus nombreuse que jamais dans l’ensemble de la société – a les moyens de bloquer le fonctionnement normal du système et de jouer un rôle majeur dans le renversement de celui-ci. 

La priorité est de tourner l’ensemble de nos structures (comités, commissions, directions locales, directions nationales) vers l’intervention en direction des entreprises et des lieux de travail. Cette priorité n’a jamais été celle du NPA, et l’on peut même dire qu’au sein de sa direction, la volonté de la mettre en œuvre a pour le moins régressé ces dernières années. Pourtant, sans une implantation ouvrière un tant soit peu significative, une politique permettant de dépasser celle des directions syndicales reste hors de notre portée : le mouvement contre la loi El Khomri a encore permis de le constater. Un travail d’implantation dans les entreprises équivaudrait à d’importants efforts militants, mais surtout, à une préoccupation permanente de l’ensemble de l’organisation et de sa direction ; ce travail ne se concrétiserait qu’avec la conviction selon laquelle aucun raccourci, aucune « recomposition politique » avec des fragments d’organisations réformistes, ne pourra suppléer à un recrutement ouvrier sur des bases de classe. En revanche, nous sommes convaincus que la politique de regroupement des militants « lutte de classe » au sein du Front social peut être un creuset pour qu’émergent des militants révolutionnaires. Faire progresser d’autres militants ouvriers partisans du « tous ensemble » sur la nécessité de l’auto-organisation des travailleurs et de l’affrontement avec l’État bourgeois, et sur l’absence de solution institutionnelle, peut être d’un grand secours pour la construction d’un parti révolutionnaire. 

C’est la perspective d’un affrontement généralisé avec les capitalistes et leur État, d’une grève de masse, qui guide notre action. À partir de l’expérience historique, nous nous préparons au fait que cet affrontement prendra, dans les pays capitalistes avancés, la forme d’une grève générale insurrectionnelle, et c’est pourquoi nous donnons la priorité à la classe ouvrière. Lors d’une crise sociale généralisée, c’est la mise en mouvement des travailleuses et des travailleurs qui peut faire basculer la situation vers une dualité de pouvoir et un renversement de l’État. 

3.2. Implanté dans la jeunesse 

En décembre 2016, une enquête de Science Po indiquait que « 62 % des Français de 18 à 35 ans se disent prêts à participer à un grand mouvement de révolte dans les prochains mois ». La jeunesse est « la flamme de la révolution prolétarienne » (Karl Liebknecht), car elle est l’élément social qui a le moins à perdre dans un bouleversement majeur de la société. Ses luttes sont souvent le moteur de celles des autres couches de la société. Il est vital que notre organisation s’implante réellement dans la jeunesse, à l’heure où des pans entiers de celle-ci sont confrontés à la précarisation de leurs conditions de vie et à une attaque sans précédent – depuis les années 1980 – de leurs conditions d’études. Macron annonce en effet une remise en cause historique des acquis du mouvement étudiant : suppression du régime étudiant de sécurité sociale, baisse notable des APL et sélection à l’entrée de la fac. L’annonce des réformes et leur potentielle application entraîneront certainement une rage, une colère et la politisation chez nombre de jeunes. Quelle est la politique qui permettra de gagner cette génération à la révolution ? 

Le NPA Jeunes doit investir les syndicats étudiants et discuter régulièrement de la politique à mener au sein des organisations larges de jeunesse. Structurer une politique syndicale étudiante à l’échelle nationale, c’est chercher à peser dans les mobilisations de jeunes et sur la situation politique, dans un contexte où l’UNEF connaît une phase de délabrement se traduisant par une baisse de son influence, tant électorale que militante. Ce syndicat paie le prix de cinq années de concessions systématiques au gouvernement Hollande. Il est donc d’autant plus important de chercher à faire du syndicalisme au quotidien, pour reconstruire une conscience d’organisation collective et chercher à massifier les luttes à venir. C’est aussi de cette manière que nous répondrons à la fois aux actions minorisantes de la frange « autonome », et au repli des étudiants dans des organisations corporatistes telles que la FAGE au sein des universités. 

La jeunesse lycéenne est un secteur important, du fait de sa capacité de mobilisation et des possibilités de politisation. C’est dans les lycées que les mobilisations ont été les plus fréquentes ces dernières années. Une intervention volontariste devant les lycées permet, en fonction de conditions favorables, d’y exercer une influence, de construire des habitudes d’organisation collective et de recruter des jeunes. Cela doit constituer un objectif prioritaire du secteur jeune et du parti dans son ensemble. 

Le parti doit aider le secteur jeune à se doter d’une politique de formation permettant aux jeunes militantes et militants d’acquérir les bases théoriques et pratiques du marxisme. 

Nous devons assumer un profil communiste et révolutionnaire : nous voulons détruire cette société et en édifier une nouvelle pour les exploités et les opprimés. Le profil révolutionnaire du secteur jeunes, son apparition propre dynamique, y compris sur les questions « politiques » (lutte contre la guerre, contre les oppressions, etc.), sont essentiels pour attirer à nous les jeunes qui se radicalisent. 

De même, c’est en cherchant systématiquement à construire une réponse à la hauteur des attaques, en préparant des militants et militantes à chercher à organiser la confrontation, et pas seulement à faire de la propagande, que nous pourrons gagner la confiance des jeunes qui se politisent. 

Aujourd’hui, le nombre de jeunes qui rejoignent le monde du travail sans faire d’études, ou qui se salarient tout en étudiant, est en augmentation. Ils sont les premiers à connaître des conditions de travail précaires. Pour les capitalistes, il s’agit d’une main d’œuvre facilement exploitable et très rentable. Nous ne considérons pas cette frange de la classe ouvrière comme inorganisable. Au contraire, sa condition de surexploitation et son jeune âge offrent un potentiel à sa combativité. Les grèves de l’été 2017 chez les livreurs à vélo, et la création dans ce secteur de syndicats et de multiples collectifs – comme le CLAP –, montrent bien qu’il ne s’agit pas d’« autoentrepreneurs » incapables de s’organiser, et que l’intervention de militants révolutionnaires peut les y aider. 

La politique du NPA dans la jeunesse n’est pas seulement l’affaire du secteur jeune, même si celui-ci est autonome dans son élaboration et son intervention. Cela doit constituer une préoccupation de l’ensemble du parti. Les jeunes participent à toute la vie du NPA : AG de sections, apparitions du parti, etc. La politique du parti en direction de la jeunesse doit être discutée par les sections et dans les directions, dans l’objectif d’aider au développement du secteur jeunes. 

3.3. Une orientation de classe pour lutter contre toutes les oppressions 

Les oppressions dites « spécifiques » – telles que le sexisme, le racisme, l’homophobie et la transphobie – tourmentent quotidiennement l’existence de millions de personnes, ce qui justifie que le fait de les combattre soit une tâche élémentaire pour les révolutionnaires. Le NPA doit mener cette tâche avec sa propre politique, c’est-à-dire en développant une orientation de classe. Nous affirmons que ce sont les travailleurs – dans toute leur diversité, quels que soient leur genre, leur couleur de peau, leur orientation sexuelle – qui ont la capacité de mettre fin non seulement au capitalisme et aux rapports d’exploitation sur lesquels il se base, mais aussi aux oppressions qu’il utilise et reproduit. Ce rôle central de la classe ouvrière ne relègue pas au second plan les luttes contre les oppressions, qui participent à la contestation de l’ordre social actuel ; au contraire, la nécessaire unification de notre classe pour renverser ce système leur donne une importance particulière. 

Des formes variables d’auto-organisation des opprimés peuvent se révéler nécessaires pour combattre les effets de l’idéologie dominante (infériorisation, fatalisme, honte, etc.) et rompre avec l’attentisme. Nous défendons aussi l’auto-organisation comme une méthode pouvant donner au combat un caractère collectif et un caractère de lutte, et permettant de se donner les moyens d’impulser la mobilisation en recherchant un soutien large et une convergence. En revanche, il n’y a pas pour nous de muraille de Chine entre la « classe ouvrière » et les « opprimés », puisque la majorité des femmes, des personnes frappées par le racisme, l’homophobie ou la transphobie, appartiennent à notre classe. Nous militons pour que le mouvement ouvrier soit au premier rang de la lutte contre les oppressions. La bataille pour que les syndicats où nous intervenons prennent en charge une intervention dans ce domaine, est centrale. Adopter un point de vue de classe, œuvrer à ce que les travailleurs prennent eux-mêmes en charge les luttes dans ce domaine, faire en sorte que les opprimés des classes populaires puissent faire entendre leur voix : voilà notre orientation pour disputer à la petite-bourgeoisie et aux courants réformistes la mainmise sur ces mobilisations. 

Face aux discriminations, aux inégalités et aux violences, nous devons saisir la moindre occasion de montrer par l’expérience que sur ce terrain également, c’est par la lutte collective et la solidarité que nous pouvons faire changer les choses. C’est aussi dans cette optique que nous participons aux mobilisations pour l’égalité des droits. Si le capitalisme est capable d’intégrer des droits, parfois sous la pression du rapport de force, nous savons qu’ils peuvent être remis en cause et que la fin des oppressions ne viendra pas de la classe dominante ; seule une révolution prolétarienne pourrait saper les bases matérielles des oppressions. Cela exige de faire le choix politique de s’implanter dans la classe ouvrière avec un profil de « lutte de classe » et anti-oppressions sans concession. Notre objectif est simple : que les secteurs les plus opprimés fassent leur le mouvement ouvrier et révolutionnaire. 

3.4. Le programme de transition et le communisme 

Notre programme n’est pas un ensemble de recettes prêtes à être appliquées par un gouvernement révolutionnaire surgi de nulle part. C’est d’abord une démarche qui cherche à s’appuyer sur des aspirations existant dans notre classe, pour tenter de leur donner un sens révolutionnaire. 

Par exemple, nous ne défendons pas seulement le principe de l’interdiction des licenciements : nous cherchons à lui donner vie en tentant de regrouper les boîtes en lutte contre les plans de licenciements. Nous savons que des ouvriers d’entreprises différentes, qui se battent isolés les uns des autres contre des fermetures de sites, finissent inévitablement par négocier les conditions de leur départ. Mais regrouper les ouvriers de plusieurs entreprises afin qu’ils se battent ensemble, c’est se donner les moyens pour que le refus « spontané » de se faire licencier se transforme en une bataille politique pour l’interdiction des licenciements ; une bataille qui conteste frontalement le pouvoir qu’ont les capitalistes de décider du sort de millions de personnes... et qui fasse naître l’idée que c’est à nous de décider qui est embauché ou pas. Nous n’attendons pas qu’un « débouché politique » surgisse et fournisse une « crédibilité » idéologique à une revendication : nous tentons d’ouvrir des brèches vers un affrontement de classe généralisé, à partir de la situation actuelle. Un affrontement à même de déboucher sur la mise en place d’un gouvernement des travailleurs directement issu de leurs organes d’auto-organisation. 

De la même manière, l’ouverture des livres de comptes est inconcevable sans la participation active et l’auto-organisation des salariés des banques et des grandes entreprises. Toute notre démarche de contestation du pouvoir du patronat suppose que les travailleuses et les travailleurs eux-mêmes se structurent, commencent à prendre en main l’organisation du travail, et plus largement celle de tous les aspects de la vie sociale. 

L’expropriation des secteurs-clés de l’économie est l’un des premiers axes de ce programme de transition. La crise bancaire et les plans de sauvetage ont fourni une nouvelle occasion d’étayer, de manière populaire, la nécessité de réquisitionner les banques. Les faillites d’entreprises, les licenciements massifs et les luttes qu’ils suscitent nous permettent également de remettre au goût du jour la lutte pour le contrôle ouvrier, et d’expliquer notre objectif d’une réquisition des grands moyens de production, de communication et d’échange. 

Notre démarche concerne l’ensemble des problèmes posés à l’humanité. Le capitalisme, selon sa logique structurelle, vise à consommer toujours plus de matières premières et d’énergie. Son objectif est de produire toujours plus et de faire toujours plus de profits. Le capitalisme ne peut pas être « vert » : il détruit notre environnement, notre planète et ses espèces vivantes. Mais là encore, il ne peut y avoir d’écologie conséquente sans une lutte conséquente contre le capitalisme, et sans la compréhension que la seule force capable d’en finir avec le capitalisme et le désastre environnemental qu’il engendre, c’est la classe ouvrière. Si nous partageons cette analyse, nous devons en tirer les conséquences en termes d’implantation, d’intervention et d’orientation. C’est en effet la classe ouvrière, alliée avec d’autres secteurs, qui peut imposer un programme de transition anticapitaliste, axé sur la remise en cause des énergies polluantes, et sur la nécessité de la planification de l’économie à l’échelle internationale. 

Nous défendons ainsi une démarche transitoire ayant pour point de départ des revendications quotidiennes, en liant celles-ci à la question du pouvoir, à la nécessité d’un gouvernement des travailleurs et à l’aspiration à une autre société. En définitive, il s’agit de lier les luttes actuelles à la remise en cause des piliers du système capitaliste. 

Notre défense du communisme, de la perspective d’une société débarrassée de l’exploitation et de l’oppression, doit être remise en avant. Elle répond à une aspiration réelle dans une partie de notre camp social de plus en plus écœurée par la loi Travail « et son monde », et qui aspire à une autre société mais sans savoir laquelle. Le fait d’être offensifs sur ce plan ne nous isolera pas, mais nous permettra au contraire de débattre et même d’attirer à nous, en particulier, des franges de la jeunesse qui ont commencé à se politiser. 

3.5. La nécessité de construire un parti de « cadres » 

Pour qu’existent des organisations révolutionnaires ne se contentant pas de proclamer des principes, nous nous donnons comme objectif de construire un parti de cadres capable de donner vie à ces principes programmatiques. Nous ne faisons pas de cette question un préalable pour l’intégration au NPA, mais c’est pour nous un objectif en son sein. Cela implique de donner les moyens à tous nos militants et militantes d’acquérir le niveau de formation le plus élevé possible. Mais cette formation doit être en cohérence et en relation permanente avec notre pratique militante, qui constitue elle-même un terrain d’apprentissage politique. Pour être en mesure d’en finir un jour avec ce système d’exploitation et d’oppression, nous devons réduire au minimum la séparation entre la sphère privée et la sphère politique. Cette séparation est un produit du système capitaliste dans lequel nous vivons. Contre cette logique de la « séparation », qui favorise inévitablement la concurrence, la passivité mais aussi le sexisme, l’homophobie et toutes les oppressions, nous cherchons collectivement à mettre en adéquation nos principes et nos choix et modes de vie. Cela n’a rien à voir avec une quelconque répression des aspirations individuelles ; il s’agit au contraire de tenter de construire ensemble une association librement consentie, à contre-courant de l’idéologie dominante véhiculée par l’État, l’école et la famille, pour atteindre un but commun : le renversement du capitalisme et son remplacement par une autre société, la société communiste. 

3.6. Un parti démocratique tourné vers l’action révolutionnaire 

Dans le parti, il y a trop de tapage au sujet des tendances et des fractions, qui seraient responsables de ses difficultés. Un tel tapage est encore plus désagréable quand il est encouragé par des militantes et des militants qui sont eux-mêmes membres de tendances non déclarées. Le fait est que le NPA n’a pas atteint les objectifs qu’il s’était fixés lors de sa création, et qu’il connaît une crise de direction sans précédent. Mais les fractions et les tendances ne sont pas la cause de ses problèmes, qui sont avant tout des problèmes politiques et ne seront pas réglés par des mesures administratives. Les militants doivent être libres de constituer leurs tendances, leurs fractions, leurs courants, etc. : un tel droit doit être respecté. Ce n’est qu’en garantissant ces règles de démocratie qu’il sera possible de « réunir le meilleur du mouvement ouvrier », profession de foi du NPA à ses débuts. 

La démocratie au sein d’une organisation révolutionnaire ne peut cependant pas se résumer à des droits formels et à des règlements statutaires, aussi importants puissent-ils être. Parvenir à agir ensemble dans la lutte de classe, tout en réussissant à discuter des différences de points de vue qui surgissent inévitablement, cela doit passer d’abord et avant tout par un accord sur les questions de fond, sur ce qu’on appelle communément le « programme », c’est-à-dire sur les objectifs et les méthodes fondamentaux de notre action. S’il n’y a pas d’accord véritable sur ces points, il ne peut y avoir que des politiques totalement différentes à chaque stade de la lutte de classe, ce qui compromet toute action coordonnée. 

Voilà où en est notre parti : d’un côté, la paralysie d’une majorité de direction qui fonde principalement son accord politique sur le souhait d’être majoritaire ; et, de l’autre, des courants qui font de plus en plus cavalier seul pour mener chacun leur politique, et qui ne cherchent même plus à élaborer une expérience commune ni à confronter leurs idées. 

Pour sortir de l’impasse, nous ne pouvons pas nous contenter de discuter de loin en loin des questions d’actualité, tout en vivant « chacun sa vie » dans son comité ou son courant. À rebours de la méthode utilisée dans notre parti depuis sa fondation, les discussions programmatiques – sur notre rapport à l’État, aux réformistes, sur la stratégie révolutionnaire, l’analyse du capitalisme contemporain, etc. – doivent nous conduire à distinguer les désaccords secondaires, qui n’entravent pas l’action commune, de ceux qui sont plus profonds. Loin d’être un facteur de division, ces discussions sont une condition essentielle pour réussir à regrouper des camarades sur la base d’un accord réel. Un tel accord ne peut se constituer que progressivement, et par une confrontation constante entre la théorie et la pratique ; il ne se nourrira pas seulement d’un accord sur des idées fixées sur le papier, mais aussi d’une confiance militante construite sur la base d’une expérience commune et de discussions de fond permanentes. 


4 – Être fidèles à l’internationalisme 
et construire une Internationale 

4.1. Droit à l’autodétermination, indépendance de classe 
et gouvernement des travailleurs : l’exemple de la Catalogne 

À moins de ne pas avoir saisi l’ampleur du soutien au référendum du 1er octobre en Catalogne, personne ne peut nier l’existence du peuple catalan et de sa volonté d’indépendance. Il est impossible de détourner la tête quand on matraque des hommes et des femmes qui veulent pouvoir décider. Nous défendons bien sûr de manière inconditionnelle ce droit démocratique, cette « liberté de séparation ». 

Mais défendre inconditionnellement ce droit implique tout autant de défendre inconditionnellement une politique d’indépendance de classe, à plus forte raison qu’en Catalogne, le processus est dirigé par une frange de la bourgeoisie et de la petite-bourgeoisie. Bien entendu, il serait erroné de nier son caractère populaire : 80 % de la population de Catalogne sont pour le droit de décider. Avec une telle proportion, il est difficile de prétendre que le monde du travail est extérieur au processus : les dockers de Barcelone se sont opposés à l’arrivée de la Guardia Civil dans le port de Barcelone ; des centaines d’enseignants ont occupé leurs établissements afin d’accueillir les bureaux de vote pour la consultation sur l’indépendance ; le personnel de la chaîne catalane TV3, par sa mobilisation, a empêché l’application de l’article 155 qui impliquait la mise sous tutelle de ses conseils de rédaction à Madrid ; sans oublier les tentatives de grève générale des 3 octobre et 8 novembre. 

Une politique d’indépendance de classe : voilà notre boussole. Ce n’est pourtant pas ce qu’ont défendu nos porte-parole, et encore moins Anticapitalistas. Sans la moindre décision du comité exécutif du NPA, trois de nos porte-parole ont signé une tribune sur Mediapart qui, en plus de surestimer la situation en évoquant une « révolution démocratique » et l’« ouverture de processus constituants sur la base de l’action des peuples dans tout l’État espagnol », ne marque pas la moindre distance vis-à-vis du gouvernement catalan, lequel n’est pas en reste en matière de politiques d’austérité. De son côté, Anticapitalistas ne cesse d’osciller entre différents écueils : sa politique ne cherche guère à se différencier de la bourgeoisie qui dirige le processus, et l’organisation a fini par voter le 21 décembre 2017 pour « Catalunya en comu », alliance entre « Podem » et la maire de Barcelone qui défend un droit à l’autodétermination virtuel, car devant être négocié et acté, selon elle, avec Madrid. 

Avec leurs députés, ces camarades ont pourtant les moyens de se faire largement entendre, pour que la lutte en faveur de l’émancipation nationale renforce la lutte pour l’émancipation sociale. Ils pourraient donner un contenu de classe à la revendication d’une république catalane, dans le sens d’un gouvernement ouvrier. Ainsi, une mesure telle que la réquisition des banques sous contrôle des travailleurs pourrait être reprise, et cela d’autant plus que les sièges sociaux des principales banques catalanes se sont retirés à Madrid. C’est ce que font nos camarades d’Izquierda Anticapitalista Revolucionaria (IZAR) : proposer l’application de ces mesures pour l’ensemble de l’État espagnol, favoriser toutes les formes d’auto-activité et défendre les moyens d’imposer ces mots d’ordre par la grève générale ; voilà une politique qui s’émanciperait de la bourgeoisie catalane et de Madrid, et qui pourrait unifier notre classe. 

4.2. Pour une Internationale révolutionnaire 

Le système capitaliste est international ; la lutte des classes l’est également. Chaque victoire ouvrière dans un pays renforce l’ensemble des travailleurs à l’échelle mondiale. Et chaque défaite en un point du globe est une défaite pour l’ensemble de notre classe. C’est pourquoi la construction d’un parti révolutionnaire en France est indissociable de celle d’une organisation révolutionnaire internationale. 

Nous ne sommes pas opposés au fait que le NPA reste membre observateur du SU de la IVème Internationale ; pour autant, il ne peut pas être seulement le parti de ceux qui sont adhérents du SU. De nombreux militants et militantes viennent d’autres courants, d’autres traditions, certains appartiennent à d’autres regroupements internationaux. Les liens internationaux des membres du NPA résultent de la façon dont il s’est constitué. Mais, surtout, le NPA ne peut pas mécaniquement, sans discussion en son sein, être le relais de la politique de la majorité du SU. De plus, les récents développements montrent que le SU a développé une politique en contradiction avec celle menée par nombre de militants du parti. L’exclusion des militants d’IZAR, dans l’État espagnol, témoigne du fait que s’est développé dans ce regroupement international un régime interne antidémocratique, en opposition avec les principes portés par les militants révolutionnaires. 

De manière plus générale, si nous sommes clairement internationalistes, nous devons discuter dans tout le parti du type d’Internationale que nous voulons édifier. Pour les anticapitalistes révolutionnaires, cela signifie construire un courant international capable d’intervenir dans la lutte des classes, une Internationale dont la première préoccupation serait l’implantation de ses sections dans la classe ouvrière, la jeunesse et toutes les couches opprimées par les capitalistes. Une Internationale qui serait capable d’engager des campagnes de masse pour tenter d’influer sur le cours de l’affrontement entre la bourgeoisie et le prolétariat, mais aussi de remettre à l’ordre du jour la discussion d’un programme communiste révolutionnaire se confrontant aux réalités du capitalisme du XXIème siècle, au lieu de discussions théoriques sans lien entre elles et séparées de la pratique. 

À lui seul, le SU n’incarne pas l’Internationale communiste révolutionnaire. C’est pourquoi nous devons chercher à regrouper à l’échelle internationale – comme nous tentons de le faire ici – les révolutionnaires issus de différentes traditions, à partir d’un accord sur la situation et les tâches. 

C’est par une pratique commune que les discussions politiques peuvent aboutir à des regroupements, comme celui qui s’est opéré autour de la plateforme « Saisir les occasions, construire une Internationale pour la révolution et le communisme », qui sera présentée lors du prochain congrès mondial. C’est avec cette méthode qu’ont été engagées des discussions avec des groupes membres du SU de la IVème Internationale ou qui lui sont extérieurs. 

Regrouper les révolutionnaires à l’échelle internationale devrait être l’un des objectifs avancés par le NPA au sein du SU. La construction d’une Internationale révolutionnaire en mesure d’exercer une influence significative ne passera pas uniquement par le renforcement du SU. Le NPA pourrait proposer au SU de s’adresser aux autres groupes révolutionnaires nationaux ou internationaux, et d’entamer des discussions sur les réponses à apporter à la crise du capitalisme, sur les campagnes communes à mener et sur le type d’organisation à construire. 

Nous savons que cette politique de recherche de discussion avec d’autres courants n’aboutira pas à des rapprochements rapides, compte tenu du fait que chacune des directions trotskystes des différentes « Internationales » est convaincue de la justesse de ses positions programmatiques et tactiques. Qui plus est, la conviction selon laquelle il faut construire autour de son propre groupe est la règle dans l’ensemble des courants internationaux, y compris le SU. Mais en ce qui nous concerne, nous avons le sentiment qu’une Internationale pour la révolution et le communisme ne se construira pas par une lente accumulation de forces uniquement autour de nous. Nous avons toujours des choses à apprendre des différentes traditions révolutionnaires trotskystes, et même au-delà. Dans de nombreux courants et organisations, il existe des expériences précieuses, des militantes et des militants de valeur. C’est au travers du débat théorique et programmatique, en tension avec l’intervention sur le terrain de la lutte des classes, que se produiront les explosions, les regroupements et les recompositions au niveau national et international. 

11/12/2017

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